Êtes-vous « attachiant » ? Explications sur la théorie de l’attachement et ses troubles pathologiques


Par France Inter

Comment les relations que nous nouons dans notre prime enfance influent sur nos relations futures ? c’est tout l’objet de la théorie de l’attachement © Rika Hayashi

Comment se répercute dans notre vie d’adulte un attachement défectueux dans la petite enfance ? Quels sont les risques ? Peut-on (et comment) faire évoluer ce trouble de l’attachement ? Retrouvez ici les réponses données par Bruno Humbeeck, Anne Lucas, et Héloïse Lhérété dans « Grand bien vous fasse ».

Extraits des réponses données au micro d’Ali Rebeihi dans « Grand bien vous fasse » par le psychopédagogue Bruno Humbeeck, l’infirmière puéricultrice Anne Lucas, et Héloïse Lhérété, rédactrice en chef à « Sciences humaines ». 

La théorie de l’attachement a été formalisée par le psychiatre et psychanalyste John Bowlbyvers 1860 d’après les travaux de Winnicott, Lorenz et Harlow. Le neuro-psychiatre Boris Cyrulnik en donnait une définition sur notre antenne il y a quelques années :

La théorie de l’attachement expliquée par Boris Cyrulnik

Héloïse Lhérété résume la théorie de l’attachement en deux points principaux :

  • la construction de liens affectifs, qui commencent dès les premières minutes de la vie, correspond à un besoin primaire, biologique, au même titre que le besoin de nourriture
  • ces premiers attachements ont des répercussions de longue durée sur la manière dont on va forger notre personnalité, se comporter par rapport aux autres, affronter la vie et les menaces, ce qu’on va attendre des relations amoureuses et affectives

Imaginons : vous avez un attachement sécure avec votre maman qui est hyper sécurisante, super rassurante, etc. : avec votre partenaire amoureux, vous aurez tendance à reproduire le même scénario et à vous dire « Finalement, l’amour est quelque chose de solide, de durable ».
Si c’est un peu plus compliqué, si vous avez un attachement qu’on va appeler « ambivalent », vous aurez tendance non seulement à faire un représentation de ce qu’est l’autre (quelqu’un de pas nécessairement fiable) mais de ce que vous êtes par rapport à lui (« peut-être que mon partenaire va me lâcher ») et vous allez adopter un certain nombre de comportements en fonction de ce scénario.

Si vous n’avez pas eu la chance d’appartenir à la première catégorie, êtes-vous condamné à voir échouer toutes vos relations ?

Non, répond Bruno Humbeeck : « Le bémol qu’on a longtemps mis autours des théories de l’attachement, c’est qu’elles sont déterministes. On avait l’impression que si on avait un attachement sécure, ce serait ainsi toute la vie (et idem s’il est insécure). Avec les modèles internes opérants, on sait maintenant qu’on peut les retravailler. C’est un peu comme si vous aviez un scénariste au milieu de votre tête qui écrit les scénarios à l’avance. Lorsqu’on les décrypte, on comprend comment on peut agir sur ces scénarios« .

Les modèles internes opérants

Bruno Humbeeck : « Les modèles internes opérants sont des modèles d’attachement qui vont devenir des manières d’aimer, de se représenter par rapport aux autres. Ils vont construire ce que Stern appelait un « accordage affectif« , qui se réalise comme une espèce de danse avec l’autre – l’attachement, ce n’est pas quelque chose qu’on fait tout seul, on s’attache à quelqu’un qui va réagir dans cette danse.

On peut les retravailler à toutes les époques de sa vie. On peut déconstruire ce qu’on a engrammé comme étant des scénarios qui sont intangibles, avec l’aide d’un tiers (c’est à ça que servent les psychologues, essentiellement) et à partir de là, on peut réaménager des manières de s’envisager dans l’attachement.

Ça va dépendre aussi des rencontres qu’on va faire : les rencontres avec ce qu’on appelle notamment les tuteurs de résilience, des personnes qui vont nous amener à repenser la manière dont on subit l’attachement et on se vit dans l’attachement ».

Un attachement insécure, est-ce forcément pathologique ?

Bruno Humbeeck : « Il y a des couacs de l’attachement. Il faut que les auditeurs entendent tout de suite que :

la perfection dans l’attachement est de toute façon une erreur.

Anne Lucas : « Il y a des attachements insécures qui ne sont pas du tout pathologiques, c’est une adaptation de l’enfant à la figure d’attachement qu’il a en face de lui et qui dans certaines conditions sont plutôt intéressantes« .

Bruno Humbeeck : « L’attachement doit être toujours en partie insécure. C’est dans le manque qu’on construit l’intelligence. C’est pour cela que les parents doivent s’autoriser à être imparfaits. S’ils étaient parfaits, on ne penserait pas à l’affection, à l’amour, ce serait devenu un dû et on aurait l’impression que c’est quelque chose qui ne doit pas se réfléchir ».

Anne Lucas : « C’est aussi dans l’imperfection que l’enfant se construit : il se sent différent de son parent. Si on était trop en symbiose, comment pourrait-on s’individualiser ? »

Quels sont les risques d’un trouble de l’attachement ?

Un risque : devenir « attachiant » : quelqu’un qui sera toujours à rechercher des relations fusionnelles par peur d’être quitté. L’attachement insécure crée des formes d’hypervigilance qui sont assez difficiles à vivre parfois pour le partenaire.

Comment savoir si on est attachiant ?

L’avis de Bruno Humbeeck : « Si on veut savoir si on est capable d’aimer ou d’être aimé, il faut se poser ces questions :

  • Est-ce que je serais mon copain / ma copine ?
  • Est-ce que je trouve ça logique ou envisageable qu’on tombe amoureux de moi ?

Si à ces deux questions, vous répondez « oui », c’est que vous êtes disponible sur le marché affectif.

Si vous hésitez, consultez : l’estime de soi a sûrement été fragilisée lors d’expériences affectives difficiles ».

Franceinter

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