Les réponses de Patrick Blanco, chef de service d’immunologie du CHU Bordeaux et chef d’équipe au CNRS sur les maladies auto immunes, et de Maya Saleh, professeur en médecine à l’université Mc Gill (Montréal) et directrice du programme « inflammation et cancer » dans l’émission La Tête au carré de Mathieu Vidard consacrée aux maladies auto-immunes.
Les maladies auto-immunes, comment ça marche ?
Patrick Blanco : « Les maladies auto-immunes, c’est lorsque le corps se retourne contre lui-même. Normalement, le système immunitaire est là pour vous protéger si vous développez une infection. A la faveur d’un dysfonctionnement (d’origine très variée), le système va vous attaquer au lieu de vous protéger.
On recense une centaine de ces maladies auto-immunes. On les classe selon le type d’organes qu’elles vont toucher. Il y a deux grandes familles :
- celles qui touchent spécifiquement un organe : thyroïdite, diabète type 1…
- celles qui touchent l’ensemble d’une partie du corps humain, les maladies systémiques : comme le lupus qui peut tout toucher qui peut toucher la peau, les articulations etc… »
D’où viennent les maladies auto-immunes ?
Patrick Blanco : « Les maladies auto-immunes touchent entre 5 et 8% de la population mondiale. On ne les connaît pas encore très bien, et sont encore difficiles à traiter.Mais dans la grande majorité des cas, c’est un faisceau d’arguments qui font que le système se dérègle. Dans leur formation on trouve des éléments génétiques, environnementaux, et le système immunitaire. »
Et pourquoi assiste-t-on à l’augmentation des maladies auto-immunes ?
Maya Saleh : « On pense à des causes environnementales plus que génétiques. Si on regarde par exemple les descendants de migrants asiatiques qui arrivent en Amérique du Nord et qui viennent de pays où les maladies auto-immunes sont assez rares, la génération d’après a un taux élevé de maladies auto-immunes, or la génétique n’a pas changé.
Une des hypothèses serait qu’on n’éduque plus assez bien notre système immunitaire : avec les changements environnementaux, la stérilisation, la pasteurisation, les antibiotiques, l’urbanisme qui font que l’on a maintenant un microbiote moins diversifié. On trouve un dérèglement du microbiote chez les patients qui souffrent de ces maladies-là. On a pu le vérifier avec des animaux. On a vu qu’une certaine écologie microbienne peut amplifier la réponse auto-immune ou protéger contre cette réponse auto-immune. »
Le stress joue-t-il un rôle ?
Patrick Blanco : « À la faveur d’un stress important (décès, rupture…), il est fréquent qu’une personne développe ce type de maladie : certaines hormones secrétées au moment du stress sont pro-inflammatoires et activent le système immunitaire. »
Et les vaccins ?
Patrick Blanco : « C’est une vraie question. Je m’occupe du cours sur les vaccinations à l’université de Bordeaux ; c’est un sujet qui intéresse beaucoup mes étudiants. La vaccination protège contre tout un tas de maladies, dont des très graves : c’est indiscutable et prouvé. De manière très exceptionnelle, on a constaté que certains vaccins pouvaient produire de l’inflammation du système nerveux central. Mais c’est très rare et ça ne suffit pas à contre indiquer la vaccination. »
Les maladies auto-immunes vont-elles se multiplier ?
Patrick Blanco : « Un des facteurs de risque de la maladie auto-immune, c’est d’en avoir déjà eu une. Tout simplement parce que le patrimoine génétique nécessaire au développement d’une maladie auto-immune est également partagé par d’autres maladies de ce genre. Il rend donc plus susceptible d’en avoir une autre. D’où la possibilité de cumuler« .
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